Le 27 janvier 2025, Mohamed* a été secouru par l'Ocean Viking dans la Région de recherche et de sauvetage maltaise.
Mohamed*: "Au Liban, tu peux mourir. Sur l’embarcation, tu peux mourir. "
Mohamed*
Pays d'origine
Date de sauvetage
Âge


Le 27 janvier 2025, après avoir reçu un « Mayday Relay » de Frontex et une alerte d’Alarm Phone, l’Ocean Viking a porté secours à deux embarcations en détresse dans la Région de recherche et de sauvetage maltaise. Mohamed* se trouvait dans l’une des deux embarcations aux côtés de 92 autres personnes. Cette nuit-là, notre équipe a été confrontée à une situation critique lorsque le cœur d’une fillette s’est arrêté juste après le sauvetage. Elle a été évacuée d’urgence par hélicoptère vers Malte avec sa mère et sa sœur, mais elle est malheureusement décédée la même nuit. Mohamed en garde un souvenir douloureux.
"Je viens du Liban. Je suis de Saïda, mais je vivais à Joun. J’aime étudier. J’allais à l’école, c’est là que j’ai appris le français. J’ai étudié l’ingénierie mécanique pendant trois ans. Mon père travaillait aussi dans la mécanique. Je veux travailler, mais la plupart des gens n’ont pas d’emploi au Liban. L’université coûte 7 000 dollars. Ensuite, un étudiant doit attendre deux ans. Mon cousin a terminé l’université il y a cinq ans et il n’a toujours pas trouvé de travail. Je veux étudier et vivre dans un pays sûr. Je fais également de la natation. Quand j’avais quatre ans, mes parents m’ont inscrit dans un club de natation. À 16 ans, j’ai gagné une course aux championnats nationaux du Liban. À 17 ans, j’ai obtenu un certificat pour enseigner la natation."
"Beaucoup de gens chez moi ont perdu un membre de leur famille, leur mère ou leur frère. Moi, j’ai perdu mon ami. Israël a bombardé tout le Liban. Ils ont bombardé mon village. 27 personnes sont mortes dans mon village dans deux maisons à Joun. J’étais en voiture quand une bombe est tombée à 20 mètres derrière moi. Tout le monde est bombardé. Tu ne peux pas aller à l’université, c’est trop dangereux. J’ai perdu deux semestres ; je suis resté à la maison. Je ne peux rien faire dans ce pays. Mon père ne peut pas travailler à cause des bombardements. Les gens disent que le Liban va s’en tirer, mais je ne pense pas que ce soit un pays sûr. "

"J’ai rencontré ma femme au Liban, mais elle est en Norvège maintenant. Elle a vécu en Norvège pendant 17 ans. Je me suis fiancé il y a trois mois. Je ne veux pas me marier au téléphone, on va se marier en Norvège. Cela fait un an qu’elle n’est pas revenue au Liban à cause de la guerre. C’est injuste de se marier à distance. J’ai fait une demande à l’ambassade, mais quand j’ai postulé Israël a commencé à bombarder et l’ambassade a fermé. Je veux travailler et vivre dans un bon pays. "
"Je suis allé en Libye parce qu’il est facile d’y aller en avion et je ne savais pas que ce serait si dangereux. Là-bas, ils n’ont pas d’humanité. J’y suis resté deux mois et demi. Il y a beaucoup de virus qui circulent là-bas, beaucoup de gale aussi. Ils ne nous donnaient pas de nourriture. On buvait de l’eau des toilettes. Ils font bouillir l’eau pour la purifier. Moi, je la faisais bouillir et j’attendais qu’elle refroidisse avant de la boire. On mangeait seulement une boîte de thon. [Pour sortir du centre de détention], j’ai payé 13 000 dollars. Je pensais voyager dans un bon bateau. Au Liban, les passeurs m’avaient dit qu’ils allaient fournir un bon bateau, mais finalement, pas du tout. "
"Au Liban, tu peux mourir. Sur l’embarcation, tu peux mourir. "
"Quand la guerre a commencé, beaucoup de gens m’ont demandé si je voulais quitter le Liban. Si j’avais su ce que ce serait, je ne serais pas parti.
La première chose que je ferai lorsque j’arriverai en Norvège, ce sera d’apprendre à parler norvégien. Ensuite je pourrai reprendre mes études et obtenir un diplôme. J’ai postulé à l’école Alpha, une école de langues en Norvège. Ma femme parle norvégien, ce sera plus facile pour moi d’apprendre avec elle.
Quand nous avons quitté la Libye, nous avons dû changer d’embarcation à deux reprises car le moteur tombait toujours en panne. Nous sommes partis de Zawiya. Le passeur nous avait dit que c’était le meilleur bateau. À bord, il y avait deux enfants, trois femmes et cette petite fille qui est morte*. Elle était assise à côté de moi pendant tout le voyage ; on parlait ensemble. C’était si dangereux… » (Mohamed commence à pleurer). « On a attendu au moins deux heures et demie avant que l’Ocean Viking arrive. Cette petite fille était si mignonne… »
Lire le récapitulatif de cette opération de sauvetage
Témoignage recueilli par Lucille Guenier
Crédit photo : Charles Thiefaine/SOS MEDITERRANEE
*Le nom a été modifiés pour protéger l’identité de ce rescapé
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